Alors là j’avoue, qu’avant que ma fille ne travaille avec son professeur de « méthodes et pratiques scientifiques » sur le sujet, je n’avais jamais entendu parler du conflore. Pour ma défense, cette plante fait partie des légumes oubliés de la Réunion. Pourtant, après quelques recherches sur le net, je me suis souvenue avoir déjà vu cette plante dans le jardin de mes parents. Elle n’avait alors qu’un but décoratif, car je doute que mes parents connaissaient ses applications alimentaires.
C’est dans le jardin potager du lycée Leconte de Lisle, que tout commence. Les élèves déterrent les rhizomes et leur professeur leur suggère de les ramener chez eux pour les faire cuire à l’eau et y goûter. Une fois rentrée, ma fille s’exécute, après avoir prélevé un morceau du rhizome pour le mettre dans la jardinière. Après tout, il pourrait avoir la bonne idée de germer et de pousser, non ? Quand à la partie cuite dans l’eau, il faut avouer que c’est un peu… filandreux. Pas terrible donc. Il aurait fallu le passer au mixer pour obtenir une purée onctueuse, alors que nous nous sommes contentés de manger le rhizome tel quel, comme nous avons l’habitude de le faire avec les patates douces.

source : Les légumes oubliés de l’île de la Réunion – ADAR – 1994
Retour sur le net pour quelques recherches, où je découvre que le conflore (nom local), de son nom scientifique Canna Indica (« canna » vient de l’hébreu « kanak » qui signifie roseau) était cultivé dans les jardins comme plante ornementale. Mais pas que…
Les « gramounes » faisaient des paniers avec les feuilles ou les donnaient aux vaches (pour 100 gr de conflore donné, une vache produit un litre de lait en plus) et des chapelets ou des projectiles de fusils avec ses graines. Quant aux rhizomes, ils étaient consommés bouillis, grillés ou en farine pour le pain et les gâteaux, lorsqu’ils n’étaient pas donnés aux cochons ! C’est cette pratique qui fait que de nos jours, le conflore est synonyme de « manzé koshon » et souffre de sa réputation de « légume du pauvre ». Pourtant les Réunionnais lui doivent une fière chandelle, car c’est le conflore – plante envahissante à croissance rapide – qui les a sauvés de la famine durant la grande guerre.
Et je confirme ! Notre rhizome s’est bien plu dans notre jardinière et quelques jours après avoir été planté, le voilà qui germe et qui fait sa première feuille, rapidement suivie par plusieurs autres. Les feuilles apparaissent une par une, au coeur de la plante, enroulées sur elles-mêmes avant de se déployer. Larges et imposantes, elles sont ourlées d’un filet rouge qui tranche avec leur couleur verte. Aujourd’hui avec plus de dix feuilles, notre conflore doit mesurer plus d’un mètre. Et d’autres pousses sont apparues. Maintenant, nous attendons les fleurs et les fruits… (d’où les photos ci-après provenant de « mi aim a ou »)
Donc, pour en revenir au « projet conflore », initié par le professeur de ma fille, nous sommes invités – les parents des élèves ayant travaillé sur le projet – au lycée pour assister à une présentation. Sont présents le proviseur, un pâtissier professionnel, un agriculteur ayant relancé la culture du conflore et qui en extrait de la farine (sans gluten !) ainsi que des journalistes.
Les élèves nous projettent des photos de la pépinière expérimentale, visitée lors d’une sortie pédagogique à la Plaine des Palmistes. Puis l’entrepreneur présente son entreprise et son prototype qui permet d’extraire la farine par voie humide. Dabrita ayant pour but de relancer la farine de conflore, des rhizomes de conflore sont distribués aux agriculteurs bio.
Bien que l’extraction de l’amidon de conflore soit difficile, l’entreprise Dabrita parvient à extraire, grâce à son prototype, du fécule pur à 95%. Et le conflore a bien d’autres atouts dans ses manches avec près de deux cents applications industrielles (cosmétique, papeterie, colle… en plus des applications alimentaires et de ses qualités : farine sans gluten, amidon qui cuit à basse température et qui attendrit la viande…)
Après cela, les parents sont invités à visiter les différents ateliers présentés par les élèves :
* fabrication de biscuits de conflore :
* confection d’un gâteau par le pâtissier :
* obtention de la farine de façon artisanale :
* plantation de rhizomes dans le potager du lycée :
Bref, une matinée enrichissante en découvertes avec des élèves intéressés, motivés et heureux de partager leurs connaissances.
Un seul petit inconvénient (pour l’instant) : la farine de conflore reste difficile – voire impossible – à trouver dans le commerce. Le seul moyen est de contacter Dabrita dont la production est – pour l’instant – limitée et confidentielle.
D’autres recettes à tester :
A lire, l’article publié sur le site clicanoo et à visionner, le reportage réalisé pour le journal télévisé de La Première, à l’occasion de la présentation du projet conflore par les lycéens de Leconte de Lisle.
Deux autres reportages à voir :
La récolte du conflore a commencé
Pingback: Errance animale (8) : Nova, Nävis et Orion | Bienvenue chez moi, à la Réunion !
Bon jour,
Article très intéressant. Merci pour ce partage. 🙂
Max-Louis
Merci beaucoup. Ravie que l’article vous plaise. 🙂
Bonjour,
Je cherche de la farine de conflor. Pourriez-vous m’indiquer où l’on peut en trouver? Je vous remercie par avance!
Bonjour,
Lors de la présentation au lycée, l’entreprise Dabrita (dont on peut voir les produits sur la dernière photo de l’article) était intervenue. Les lycéens avaient aussi visité leur pépinière. Je ne sais pas si cette société vend de la farine de conflore aux particuliers. Le mieux reste encore de la contacter (une simple recherche sur internet devrais permettre de trouver leurs coordonnées). Personnellement je n’ai jamais vu de farine de conflore dans le commerce, mais en même temps, je n’ai pas cherché à m’en procurer.